Faire l’aumône  : se donner

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Aumône

Le temps de carême nous offre la possibilité de découvrir un peu plus en profondeur l’aumône, qui de loin, est la première action des actes pénitentiels que le chrétien doit accomplir. L’aumône est la forme concrète de l’amour dont Dieu veut l’expression entre les hommes.

Dieu, le premier à faire aumône

La manifestation de Dieu à l’homme nous fait comprendre que Dieu est le premier à faire l’aumône à l’homme. Avant même de le créer, Dieu dispose la création pour l’homme. Il lui fait l’aumône de la vie et le place au cœur et au sommet de toute son œuvre, pour offrir à l’homme les meilleures conditions de vie, en sorte que rien ne manque à son épanouissement.

Plus que cela, Dieu ne se laisse pas décourager par la dévastation du péché qui s’est invité dans la vie de l’homme. La désobéissance de l’homme à l’ordre de Dieu est, sans conteste, un tournant majeur dans le mystère de rédemption de l’homme, du moins tel que nous le voyons aujourd’hui. La bonté de Dieu pour l’homme, son amour pour sa plus parfaite créature, le pousse à ne rien ménager pour le sauver du péché. Pour cela, Dieu choisit des hommes, envoie des prophètes, communique sa Parole pour orienter l’homme. Ce sont autant de niveau de la sollicitude d’un Dieu qui donne sans compter.

Dieu, dans les temps derniers, a même entrepris de ne rien retenir de sa débordante générosité pour l’homme ; il donne son Fils. Saint Jean, dans le quatrième évangile, nous dévoilera la raison de ce don : l’amour. Il dit : « Dieu a tant aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui, ait la vie éternelle  » (Jn 3, 16). On peut dire que le père a fait l’aumône de tout ce qu’il a et de tout ce qu’il est à l’homme, pour son salut. Le don du Fils est la conséquence de l’amour illimité de Dieu pour l’homme.

Pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses bien-aimés

La création est l’aumône de Dieu à l’homme  ; la Parole l’est pareillement. Mais Jésus est le plus grand don que Dieu puisse faire à l’humanité. Jésus lui aussi entre dans cette dynamique de don. Saint Paul, dans la lettre aux Philppiens, dit  : « Le Christ Jésus qui, de condition divine, n’a pas considéré comme une proie à saisir d’être l’égal de Dieu. Mais il s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur » (Ph 2, 6). Le Christ est Dieu, avec les honneurs divins, comme saint Paul l’enseigne. Pourtant, en acceptant de venir dans le monde, il renonce à toutes prérogatives divines et accepte le dépouillement. Il reste Dieu dans la condition humaine.

Jésus s’est manifesté au monde comme un don total de soi pour le salut de l’homme. On peut bien le dire, tout comme son Père, il s’est fait aumône pour l’homme. On l’a même traité d’avoir perdu la tête, car il n’avait pas le temps pour lui-même. En synthèse de tout son ministère, il dira : « Je ne suis pas venu pour être servi, mais pour servir et donner ma vie en rançon la multitude  » (Mt 20, 28) ou encore, « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime »(Jn 15, 13).

Donné par Dieu, Jésus est resté dans la logique de ce don, s’étant donné jusqu’à sa propre vie sur une croix, s’étant donné jusqu’à son Esprit répandu sur l’Église. Il s’est fait vraiment le serviteur, qui n’écrase pas par son apparat mais qui se fait pauvre (c’est-à-dire homme) pour enrichir l’humanité de sa divinité. Précisément, la manière de Dieu, manifestée en Jésus, de faire l’aumône à l’homme, est de se donner à celui-ci pour qu’il soit pleinement à l’image de Dieu. Les grands penseurs spirituels disent  : Dieu a pris notre humanité pour nous donner sa divinité en échange. L’aumône est bien cet échange : arracher la misère de l’autre pour lui donner notre richesse et faire en sorte qu’il soit comme nous. C’est la logique de Dieu. Elle est le modèle de l’aumône que l’homme est appelé à faire à son prochain.

« Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même »

Ces mots viennent d’un poème de sainte Thérèse de Lisieux dont le titre est « Aimer, c’est tout donner ». Les dernières phrases de cette versification sont : « Aimer, c’est tout donner, Aimer c’est tout donner, Et se donner soi-même, et se donner soi-même ; Aimer, c’est tout donner ».

Une petite remarque s’impose avant de cerner la manière dont l’aumône est le signe de l’amour authentique, de l’amour incarné. Dieu est amour et il communique cet amour avec autant de variété que l’imagination nous en donne le loisir. Dieu ne donne que l’amour. Son Fils est amour, son Esprit est amour mais aussi sa création est amour, son Église est amour et notre propre vie est amour. Aux mots usuels, l’aumône de Dieu, c’est l’amour. Quand saint Thérèse dit : « Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même », elle décrit Dieu qui ne retient rien pour lui et qui se donne totalement. C’est à l’imitation de cette générosité de Dieu que nous sommes invités.

On peut le dire à présent : l’aumône est la signature authentique de l’amour ou, si l’on préfère, « faire aumône », c’est donner Dieu. Dans ce sens, notre aumône peut prendre mille et une facettes, comme on sait que l’amour peut se manifester de mille et une manières à l’homme. Tous les gestes d’amour de l’homme envers son prochain sont des chemins de l’aumône que nous sommes appelés à parcourir pour rencontrer l’homme.

Faire l’aumône, c’est donc tout donner sans réserve. Pédagogiquement, il s’agit de grandir progressivement dans la spiritualité du don, en donnant chaque fois toujours un peu plus, en donnant tout ce que l’on possède, et de finir par se donner soi-même alors même qu’on n’a plus rien à donner, si ce n’est soi-même.

Voici une série d’interrogations pour vérifier la qualité de notre aumône : ce que nous donnons a-t-il une valeur pour nous-mêmes ? Est-il une partie de nous-mêmes ? Est-il de l’amour, la totalité de notre amour ? Si « faire aumône, c’est aimer », et si « aimer, c’est tout donner et se donner soi-même », alors, « faire aumône, c’est tout donner, et se donner soi-même », c’est donner l’amour, c’est-à-dire Dieu  ; c’est communiquer le Christ et son Esprit ; c’est communiquer la vie. Faire aumône, c’est bien cela : redonner vie.

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Abbé Jean Oussou-Kicho

Je suis prêtre de l’archidiocèse de Cotonou (Bénin), ordonné en 2008, licencié en théologie morale. Directeur de complexe scolaire, je suis investi dans la pastorale des réseaux sociaux, devenus un nouveau terrain propice pour l’évangélisation et l’éducation des chrétiens

Cet article a 3 commentaires

  1. Danielle

    Merci mon père

  2. Gilbert Yamkoudougou

    Merci, Mr. l’Abbé, pour ce grand éclairage sur la spiritualité de ‘aumône.

  3. Honorine

    Que le Seigneur vous aide dans votre mission.
    Et vous fortifie

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