Un prêtre couche avec ma femme : que faire ?

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La question des attitudes pédophiles des prêtres ne cesse d’alimenter l’actualité depuis quelques années. En Occident, le problème a pris une tournure telle que les conférences épiscopales prennent des mesures draconiennes pour endiguer le mal. Malheureusement, il peut arriver que les victimes ne soient pas uniquement les enfants, mais aussi les personnes ayant atteint la majorité. Parmi celles-ci, se retrouve aussi une autre catégorie : les femmes sous toit. Dans cet article, nous voulons l’aborder à partir de l’homme qui découvre un lien coupable entre sa femme et un prêtre. Quelle doit être son attitude, en tant que chrétien ? Notre objectif est de proposer une gestion chrétienne de l’offense et du scandale par l’offensé.

Une profonde déception de l’homme

Avant d’en arriver à une solution, il faut nécessairement constater le douloureux ressenti de l’homme qui est trahi dans son amour propre. Il s’agit ici d’une double trahison : trahison de son épouse qui viole, par ce fait, le principe de l’unité du couple par son infidélité. La femme qui entretient secrètement des relations d’intimité avec une autre personne, quelle qu’elle soit, provoque dans le cœur de son mari, une blessure béante dont la guérison nécessitera un long accompagnement psychologique et spirituel. La déception est si profonde que la colère et la violence peuvent facilement prendre possession de l’homme. Cette déception est d’autant plus grande que l’homme coupable est précisément celui auprès de qui le chrétien, se trouvant dans une telle situation, devrait se rendre pour solliciter des conseils avisés. Un prêtre qui « sort » avec une femme, qui pis est, une femme sous le toit marital, est un drame qu’il ne faut sous aucun prétexte, sous-estimé. La gravité ne touche pas seulement à la matière de l’acte posé mais aux conséquences incalculables sur son identité même de prêtre et sur la mission évangélisatrice de l’Église.

Un chrétien qui découvrirait les relations coupables entre sa femme et son prêtre peut facilement claquer la porte de la foi, lui et toute sa famille avec. Disons-le clairement, une frange non considérable de la communauté chrétienne peut se volatiliser dans le monde et trouver refuge, à défaut de rester définitivement à la maison, auprès des autres groupes évangéliques. Un homme qui en vient à être témoin de la compromission coupable de sa femme et de son prêtre est en droit d’être profondément déçu et d’en vouloir à tous au point de prendre des mesures drastiques vis-à-vis de l’un et de l’autre.

Gérer le prêtre et la femme avec colère.

Sous l’effet de la colère, l’homme prend souvent deux décisions qui, après coup et après analyse, ne sont pas appropriées. Vis-à-vis de la femme, dans la majorité des cas, c’est la séparation et le divorce qui pointent à l’horizon. L’homme demande à la femme de quitter immédiatement le toit et de rejoindre ou son prêtre ou ses parents. La solution qui consiste à divorcer de sa femme n’est pourtant pas chrétienne, nous le savons que bien. On objectera que le Christ a demandé de divorcer avec les femmes infidèles. Ce qui est tout à fait faux, car l’union illégitime dont parle le Christ n’est pas l’infidélité de la femme, mais un lien matrimonial dont la nature même est interdite, comme par exemple, se marier à sa propre fille ou à son neveu, ou à la fille d’un autre lit de sa femme, etc.
Ces considérations ne sont d’ailleurs pas l’objet de notre article. Nous en avons longuement traité ailleurs. Dans un couple, qu’il soit chrétien ou non, la fermeté du lien matrimonial dans le « oui pour toujours » exclut tout renvoi de la femme ou du mari, quelle que soit la monstruosité de leur forfait. Il ne faut donc jamais renvoyer sa femme, sous l’effet de la colère.

Par rapport au prêtre, on peut être tenté, courroucé, de le diffamer et de le violenter, de le dénigrer publiquement ou même de l’assigner devant la justice. Tout ceci est normal mais à une considération près : quand les autres moyens que je m’en vais proposer dans le paragraphe suivant, seront épuisés. Dans tous les cas de figure, la violence, le fait de porter atteinte à la dignité d’autrui, et choses du même genre, ne doivent plus avoir droit de cité dans le comportement chrétien. Il faut donc éviter, à tout prix, de laisser envenimer la situation en prenant des décisions inspirées par la colère. En tant que chrétiens, nous ne devons pas nous inspirer de la sagesse du monde. Mais alors, comment gérer ce problème, en tant que chrétien ?

Quel chemin la Parole de Dieu propose à l’homme ?

Le Christ sait que les problèmes surviendront dans la communauté et déjà, il prévient ses disciples sur la bonne gestion des situations crisogènes et des offenses entre les frères. Il dit :

« Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches, seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends, en plus avec toi une ou deux personnes, afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins. S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain »

Dans le cas de figure, le Christ propose un règlement de l’offense, puisqu’il s’agit véritablement d’une offense, en trois étapes : de l’offenseur à l’offenseur, d’un duo ou trio à l’offenseur, de l’assemblée à l’offenseur. On voit derrière cette pédagogie proposée par la Christ, le souci de sauver le frère fautif, par tous les moyens. Le verset introductif à la démarche est d’ailleurs suffisamment clair : « Votre Père qui est aux cieux ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu » (Mt 18, 14).

C’est à l’offensé de faire le premier pas, pour sortir son frère chrétien, fut-il prêtre ou épouse, de ce pétrin dans lequel l’esprit malin les conduit. Il faut peut-être que le répète : si nous nous en tenons à la Parole du Christ, c’est encore celui qui est offensé qui doit enclencher le processus de la correction fraternelle. De manière concrète, que ce soit à l’endroit de la femme comme du prêtre, voici le comportement que le Christ propose à l’époux :

1ère étape : Aller voir le prêtre lui-même, sans témoin et lui faire savoir que vous êtes bien informé de ce qu’il vit avec votre épouse. Vous lui demander de cesser immédiatement, en lui rappelant sa promesse de célibat et son obligation de vivre celui-ci dans la chasteté. Vous rencontrerez aussi votre épouse, pour l’informer de tout ce que vous savez, en lui demandant de se raviser sans délai. Vous lui rappelez, comme au prêtre, sa promesse de fidélité jusqu’à la mort.

2e étape : Si la première médiation échoue des deux côtés, vous invitez un autre prêtre et une autre femme, remplis de sagesse pour rencontrer les deux fautifs et les inviter à la raison. Ces deux personnes sont les témoins de la démarche que vous menez et en même temps représentent la communauté en miniature. Le problème sort du coup de son caractère privé pour devenir public. Le refus de cessation nous conduit déjà dans le scandale, un péché public devenant ipso facto un scandale.

3e étape : Si au pire des cas, la seconde médiation échoue, il faut informer la communauté chrétienne. Ici l’évêque diocésain sera mis au courant ainsi que les parents de la femme et une frange de la communauté chrétienne.

Si au bout de ce chemin de charité et de pardon, prêtre et femme, ne veulent point entendre raison, il faut considérer l’affaire comme un scandale et passer à l’étape que propose saint Paul.

Un prêtre et une femme à scandale : Que faire ?

Le scandale est un péché public qui a pour conséquence d’entraîner d’autres personnes dans la même direction. Le scandale a donc un effet négatif sur la communauté chrétienne. Se taire sur un scandale, c’est ouvrir la porte à la possibilité de sa multiplication gangreneuse parmi les fidèles. Jésus prévient ses disciples :

« Celui qui est un scandale, une occasion de chute, pour un seul de ces petits qui croient en moi, il est préférable pour lui qu’on lui accroche au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’il soit englouti en pleine mer. Malheureux le monde à cause des scandales ! Il est inévitable qu’arrivent les scandales ; cependant, malheureux celui par qui le scandale arrive ! »

Un chrétien qui vit dans le scandale n’en est plus un. Il est relégué au même rang que les païens, c’est-à-dire au rang de ceux qui n’ont jamais reçu le Christ et son Esprit dans leur vie.

C’est pourquoi, on comprend aisément que le Christ dise : le frère qui se ferme totalement à la correction fraternelle devient un scandale pour la communauté et pour cette raison, il doit être extirpé de cette communauté pour trouver sa place au fond de la mer.

Tel est aussi l’avis de saint Paul qui envoie une sentence sans appel aux Corinthiens. Dans cette communauté en effet, a cours une affaire qui, au lieu de faire la honte de la communauté, fait plutôt sa fierté. Voici comment saint Paul présente la cause et la solution qu’il propose pour l’endiguer :

« On entend dire partout qu’il y a chez vous un cas d’inconduite, une inconduite telle qu’on n’en voit même pas chez les païens : il s’agit d’un homme qui vit avec la femme de son père. Et, malgré cela, vous êtes gonflés d’orgueil au lieu d’en pleurer et de chasser de votre communauté celui qui commet cet acte. Quant à moi, qui suis absent de corps mais présent d’esprit, j’ai déjà jugé, comme si j’étais présent, l’homme qui agit de la sorte : au nom du Seigneur Jésus, lors d’une réunion où je serai spirituellement avec vous, dans la puissance de notre Seigneur Jésus, Il faut livrer cet individu au pouvoir de Satan, pour la perdition de son être de chair ; ainsi, son esprit pourra être sauvé au jour du Seigneur. Vraiment, vous n’avez pas de quoi être fiers : ne savez-vous pas qu’un peu de levain suffit pour que fermente toute la pâte ? »

Le scandale est une offense publique, non seulement à la personne de l’homme offensé, mais aussi à toute la communauté. Si le prêtre et la femme s’entêtent dans ce lien peccamineux, leur comportement devient scandaleux et la mesure n’est plus de médiation, mais d’extirpation automatique de la communauté. Les dispositions canoniques pour gérer une telle situation sont prévues par l’Église, que ce soit du côté du prêtre que de la femme mariée. Il faut aussi confier l’affaire à la justice, pour que le droit situe les responsabilités des uns et des autres dans ce délit.

Il est d’ailleurs installé, de plus en plus dans les pays occidentaux, des tribunaux ecclésiastiques de nature à juger les prêtres fautifs. Il faut espérer que cela s’étende aussi aux chrétiens qui sont responsables de fautes lourdes. Il ne faut se tromper sur l’esprit qui sous-tend l’installation de ces tribunaux : c’est pour une meilleure prise en charge des chrétiens qui se retrouveraient dans les situations inconfortables du point de vue de la loi chrétienne. Cela n’empêche nullement la justice de chaque nation de continuer à dire le droit pour la sécurité des biens et des personnes dans l’État.

Conclusion

Pour essayer une conclusion, il faut déjà noter la déception d’un homme dont la femme infidèle a des liaisons adultérines avec le prêtre. Cette déception nécessite un accompagnement psychologique et spirituel pour éviter des conséquences désastreuses sur l’homme et la communauté de foi. Il faut surtout éviter, en tant que chrétien, de prioriser des solutions mondaines de divorces et ou de vengeance. Il sera donc nécessaire, avant tout, d’entrer dans l’esprit du Christ qui veut le salut du prêtre et de la femme coupables. Pour cela, une médiation tripartite sera initiée. Si toutes les formes de médiations rencontraient résistance auprès des deux fautifs, il faut alors les éloigner de la communauté en enclenchant le processus canonique et judiciaire requis. Ils auront été les seuls responsables de leur choix. Des mesures correctionnelles seront proposées pour leur salut de leurs âmes.

Que dire enfin sinon inviter à la prière pour que les offenses de cette nature n’adviennent pas. Il faut prier les uns pour les autres : pour les prêtres, de plus en plus fragiles, pour les couples qui se disloquent et pour toute la communauté, afin qu’elle continue de témoigner du Christ dans le monde. Il faut prier pour ce prêtre et cette femme sans que l’homme n’oublie de s’interroger sur ses responsabilités personnes dans l’infidélité de son épouse.

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Abbé Jean Oussou-Kicho

Je suis prêtre de l’archidiocèse de Cotonou (Bénin), ordonné en 2008, licencié en théologie morale. Directeur de complexe scolaire, je suis investi dans la pastorale des réseaux sociaux, devenus un nouveau terrain propice pour l’évangélisation et l’éducation des chrétiens

Cet article a 4 commentaires

  1. Agassoussi Sèmèvo Eric

    J’ai suivi avec grand intérêt votre développement à cet sujet, cependant, je suis resté sur ma soif.
    Il y a la théorie qui qui est souvent très loin de la pratique. Croyez-vous que c’est aussi facile pour un homme d’accepter encore sa femme qui a commis l’adultère chez soi ? Et quelle serait la suite de l’ambiance au sein de ce couple ?
    Pour les tous petits conflits, l’égo de l’homme est déjà à un niveau élevé, qu’en sera-t-il avec ce problème d’adultère de sa femme ?
    Je crois que votre développement n’a pas abordé toutes les situations qui peuvent naître de ce problème.
    Vous avez dit : ”Si toutes les formes de médiation rencontraient résistance auprès des deux fautifs, il faut alors les éloigner de la communauté en enclenchant le processus canonique et judiciaire requis. ”
    Un homme qui sait que 2 ou 3 personnes sont informées de l’infidélité de sa femme devient un homme diminué, faible .

    Je voudrais savoir, que deviendra ce couple après toutes les étapes de résolution ?

    1. Abbé Jean Oussou-Kicho

      Bonjour Monsieur Agassoussi. Je vous ai lu avec autant d’intérêt. Mais votre réflexion me laisse perplexe sur un point. Le voici : Croyez-vous que c’est aussi facile pour un homme d’accepter encore sa femme qui a commis l’adultère chez soi ? Et quelle serait la suite de l’ambiance au sein de ce couple ? Cela suppose que le divorce est sans conteste l’unique solution possible. Ensuite vous dites qu’un homme devient faible quand d’autres sont informés de l’infidélité de sa femme.

      Ici, nos considérations sont éclairées par l’Évangile du Christ qui dit que le mariage est indissoluble, quand aucun empêchement ne l’invalide. Si nous sommes bien dans un mariage validement célébré, alors, et vraiment alors, aucune puissance au monde ne peut le séparer, même si l’un des conjoints était coupable d’une faute énormissime. Cela signifie que, d’un regard chrétien, le conjoint offensé n’a pas une alternative dans ses choix. Il faudra bien qu’il ou elle accepte le conjoint. Si cette balise est acceptée, toutes nos considérations humaines tombent, par obéissance au Christ.

      1. Loumouangani Jérôme Grâce

        Bonjour mon père ! Dans une situation pareille, un accompagnement spirituel et psychologique serait aussi possible pour le victime. Parceque ceci est un fait qui touche à la fois sa psychologie et sa foi. l’Eglise est un refuge, un endroit sûr où on ne craint d’aucune menace et un appui pour notre foi . Mais ici l’homme, victime de l’infidélité aura l’impression que ce refuge devient à couver et même menaçant et que cet appui fissuré. Donc l’homme aura perdu confiance à sa femme et à l’Eglise ; en allant jusqu’à généraliser toutes les femmes et tous les prêtres et éprouvant un dégoût vis à vis de son épouse. C’est à ce point qu’un accompagnement est nécessaire. Merci

  2. Paulus

    Bonsoir mon père N’y a que ce matin que je ne sais par quel miracle, j’ai recommencé à avoir une considération pour les hommes d’églises. surement parce que j’ai pris un certain temps à accepter ce qui m’est arrivé et aussi parce que je prend le risque de croire que tous les hommes d’église ne sont pas tous pareil. j’ai vécu un drame pareille que le sujet traité ici et peut être continu à le vivre. j’ai du mal à en parler avec quiconque et cela me pourris la vie . je pense même que cela me tue à petit feu. je vous prie de bien vouloir accepter que vous et moi discutions à ce sujet . peut être cela m’aiderai à me sentir mieux. merci

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