Peut-on se marier à sa cousine ?

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Bonjour mes frères et sœurs du Groupe « Un prêtre vous répond ». La semaine dernière, un membre a posé une question sur le mariage entre cousins. La quasi-totalité des réponses était négative. J’ai fait remarquer qu’il y a nécessité de clarifier cette question qui est loin d’être simple. En Afrique, l’extension de la famille induit que la notion de frère et de sœur dépasse largement les bornes de la famille nucléaire. Ton frère ou ta sœur, c’est non seulement celui ou celle né(e) de tes parents, mais aussi ceux qui sont nés des cousins, oncles, tantes, tantes par alliance, etc. La liste n’en finira pas. Ce qui rend la question plus délicate en contexte africain. De la même manière, la notion de consanguinité (descendance paternelle) et d’affinité (descendance maternelle) n’existe pratiquement pas, de sorte que la fille de la sœur de mon père (tante paternelle) est autant ma cousine que celle du frère de mon père (oncle paternel). La même considération se fait au niveau de la mère. La fille de la sœur de ma mère (tante maternelle) est ma cousine autant que la fille du frère de ma mère (oncle maternel). Toute la descendance des frères et sœurs des parents directs ou même éloignés est considérée comme étant ma parenté. Du coup, la question du mariage avec la cousine devient aussi compliquée que complexe en contexte africain.

Pourtant, l’Église notre mère ne perçoit pas la chose de cette manière. Le droit canonique, aborde la question dans son article 1091, que je m’en voudrais de ne pas transcrire ici avant d’oser une sommaire interprétation.

Can 1091 : § 1. En ligne directe de consanguinité, est invalide le mariage entre tous les ascendants et descendants tant légitimes que naturels.
2. En ligne collatérale, il est invalide jusqu’au quatrième degré inclusivement.
3. L’empêchement de consanguinité ne se multiplie pas.
4. Le mariage ne sera jamais permis s’il subsiste quelque doute que les parties sont consanguines à n’importe quel degré en ligne directe ou au second degré en ligne collatérale.

Expliquons un peu ces différents empêchements :

La « parenté directe » est le fait que les descendants proviennent d’une même souche, comme on le ferait pour un arbre généalogique : arrière-grand-père, grand-père, père-fils, petit-fils, arrière-petit-fils. Toute cette ligne est directe. Et il ne peut jamais avoir de mariage entre eux. Le père ne peut se marier à sa fille, le grand-père à sa petite-fille.

La « parenté collatérale » renvoie au lien que les différents membres d’une même famille ont entre eux du fait qu’ils descendent tous d’un ancêtre. On prendra ici en considération les oncles, les tantes, les neveux et les nièces. Exemple : La relation entre le frère de mon père et moi (oncle et neveu ou nièce) est une relation indirecte encore appelée « collatérale ». La relation que j’ai avec l’enfant de mon oncle et moi est une relation collatérale, même si nous portons le même nom de famille.

Les degrés : les degrés sont les niveaux de séparation entre les membres de la lignée directe ou indirecte (collatérale). Entre mon père et moi, la relation est au premier degré. Entre mon grand-père et moi, la relation est au deuxième degré. Entre mon arrière-grand-père et moi, la relation est au troisième degré, etc. Entre mon frère (ou ma sœur) et moi, la relation est au deuxième degré. Entre mon oncle et moi, la relation est au deuxième degré. Mon oncle ou ma tante m’est parenté au troisième degré (1er degré entre mon grand-père et mon oncle ; 2e degré entre mon oncle et mon père ; 3degré entre mon oncle et moi). Si j’avais un enfant, mon oncle entretient avec lui une relation collatérale de 4e degré. Par rapport aux cousins germains (enfants issus des oncles ou des tantes), la relation collatérale est au 4e degré (1er degré entre son père et mon cousin ; 2e degré entre mon cousin et ses frères et sœurs ; 3e degré entre mon cousin et mon père ; 4e degré entre mon cousin et moi).

Ce canon interdit tout mariage entre les membres d’une famille en ligne directe quel que soit le degré et en ligne indirecte collatérale au quatrième degré inclus. Les enquêtes canoniques en ce qui concerne le mariage sacramentel veillent à cela pour ne laisser subsister aucun doute dans les relations entre les futurs époux.

La question qui suivra cette explication est évidemment claire. Peut-on en ligne indirecte (collatérale) se marier à sa cousine ? L’Église, en interdisant le mariage jusqu’au quatrième degré inclus en ligne collatérale vise un objectif : protéger la famille des déviations et permettre à la famille de s’enrichir par l’arrivée d’autres personnes qui ne sont pas dans la lignée familiale. Il faut donc comprendre, dans cet esprit, que l’on peut décourager l’union entre des gens de la même famille. D’ailleurs les réponses des autres membres sont claires à souhait.

Cependant, si ces conditions sont respectées et qu’il arrive que des gens de la même famille s’aiment au point de vouloir se marier (si toutes les conditions canoniques sont remplies, je le répète à dessein), il ne devrait pas avoir d’opposition. Déjà dans nos familles traditionnelles, la réalité est présente où des cousins plus ou moins proches se marient avec la bénédiction des sages de la famille. Les enquêtes révèlent que, dans le monde, plus de 45% des unions sont intrafamiliales. À défaut d’encourager cette pratique, l’Église est appelée à éclairer les consciences sur les risques de mariages entre les membres rapprochés d’une même famille et à élucider toujours plus la pertinence de sa proposition.

Je remercie notre frère qui a posé la question.

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Abbé Jean Oussou-Kicho

Je suis prêtre de l’archidiocèse de Cotonou (Bénin), ordonné en 2008, licencié en théologie morale. Directeur de complexe scolaire, je suis investi dans la pastorale des réseaux sociaux, devenus un nouveau terrain propice pour l’évangélisation et l’éducation des chrétiens