Quatre péchés à propos des repas

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Nous sommes d’accord qu’aucun aliment n’est interdit pour le chrétien. Mais tout aliment devient un interdit à partir du moment où il devient occasion de péché envers soi-même et envers le prochain. Et alors, il faut s’abstenir de le consommer.

Nombreux sont les chrétiens qui se posent des questions sur les repas. Doit-on manger la viande de porc ? Peut-on manger le repas que nos frères des autres religions nous présentent ? Il y a des animaux interdits de consommation dans la Bible, comment se fait-il que les chrétiens les consomment aujourd’hui allègrement ? Les musulmans s’interdisent des repas : l’alcool par exemple. Les juifs ne mangent pas le porc, pas davantage les musulmans. Mais les chrétiens eux, par contre, mangent tout et proclament gaillardement qu’ils n’ont pas d’interdits alimentaires. Pour eux, il n’y a aucun péché à manger ceci ou cela. Ils fondent d’ailleurs leur argument sur l’autorité des paroles du Christ : « Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui rend l’homme impur ; mais ce qui sort de la bouche, voilà ce qui rend l’homme impur. » (Mt 15, 11). Si cet enseignement est sans discussion, il convient de le circonscrire pour mieux le comprendre. En effet, il y a bel et bien des cas où la consommation d’un repas peut devenir un péché. Allons à la Bible pour mieux comprendre.

Deux péchés liés au corps : la gourmandise et l’allergie sanitaire

Nous savons que la gourmandise est un péché. Dans le livre des Proverbes, le sage conseille : « Ne sois pas de ceux qui s’enivrent et qui font bonne chère, car l’ivrogne et le glouton courent à la ruine ; ils se réveillent un jour vêtus de haillons » (Pr 23, 20-21). La gourmandise est synonyme de « gloutonnerie » en tant qu’elle manifeste chez l’individu une voracité alimentaire au-delà du permis. Le gourmand mange et mange encore. Il ne connaît pas de mesure. Je connais une dame qui, pour ne pas perdre un repas, peut manger au-delà de sa mesure, au péril même de sa santé. L’excès dans le repas est un péché, quelle que soit la douceur du plat. À cela, il faut ajouter les dépendances alimentaires. On peut bien sûr développer des addictions vis-à-vis d’un menu particulier. Certaines personnes ne résistent pas à la pâte alimentaire ou à une friandise. Chacun a son talon d’Achille à ce niveau. Toute addiction étant un péché, celle liée au repas rentre dans cet ordre.

L’autre péché lié au repas est sanitaire. Si ton corps ne supporte pas un type de repas et que, par faiblesse ou pour faire plaisir à des camarades, tu en manges, tu tombes dans le péché qui consiste à détruire ton propre corps. Or nous savons que le « corps » est le temple de l’Esprit Saint et qu’il faut en prendre soin. Il faut accepter de s’appliquer la Parole de Dieu jusqu’à ce point-ci : « Ne savez-vous pas que vous êtes un sanctuaire de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? Si quelqu’un détruit le sanctuaire de Dieu, cet homme, Dieu le détruira, car le sanctuaire de Dieu est saint, et ce sanctuaire, c’est vous » (1 Co 3, 16-17). Si nous dénonçons l’alcool et le tabagisme comme des substances toxiques pour le corps, il faut aussi rejeter, avec la même énergie, la consommation de tout aliment capable de perturber notre équilibre corporel et, conséquemment, psychique, moral et spirituel.

Deux péchés liés au scandale

Le plus évident est celui dont traite saint Paul quand il répondait à la question des Corinthiens sur la consommation des viandes offertes aux idoles. En effet, les chrétiens étaient confrontés aux mêmes questions que nous aujourd’hui. Leur connaissance restées dans l’idolâtrie leur envoyait des viandes offertes à leurs divinités pour qu’ils les mangent. Peut-être le faisaient-ils de bonne foi, à cause de la bienséance culturelle ! La nouvelle vie des Corinthiens à la suite du Christ leur pose un véritable problème dans l’ordre de l’agir moral. Doivent-ils ou non manger ces aliments ? Saint Paul tranche la question en les renvoyant une première fois au rapport du chrétien avec les divinités et surtout à leur responsabilité vis-à-vis des plus faibles. Relisons le texte pour nous en convaincre :

Au sujet des viandes qui ont été offertes aux idoles, nous savons bien que nous avons tous la connaissance nécessaire ; […] Quant à manger ces viandes offertes aux idoles, le pouvons-nous ? Nous savons que, dans le monde, une idole n’est rien du tout ; il n’y a de dieu que le Dieu unique. Bien qu’il y ait en effet, au ciel et sur la terre, ce qu’on appelle des dieux – et il y a une quantité de « dieux » et de « seigneurs » –, pour nous, au contraire, il n’y a qu’un seul Dieu, le Père, de qui tout vient et vers qui nous allons ; et un seul Seigneur, Jésus Christ, par qui tout vient et par qui nous vivons.
 
Mais tout le monde n’a pas cette connaissance : certains, habitués jusqu’ici aux idoles, croient vénérer les idoles en mangeant de cette viande, et leur conscience, qui est faible, s’en trouve souillée. Ce n’est pas un aliment qui nous rapprochera de Dieu. Si nous n’en mangeons pas, nous n’avons rien de moins, et si nous en mangeons, nous n’avons rien de plus. Mais prenez garde que l’usage de votre droit ne soit une occasion de chute pour les faibles. En effet, si l’un d’eux te voit, toi qui as cette connaissance, attablé dans le temple d’une idole, cet homme qui a la conscience faible ne sera-t-il pas encouragé à manger de la viande offerte aux idoles ? Et la connaissance que tu as va faire périr le faible, ce frère pour qui le Christ est mort. Ainsi, en péchant contre vos frères, et en blessant leur conscience qui est faible, vous péchez contre le Christ lui-même. C’est pourquoi, si une question d’aliments doit faire tomber mon frère, je ne mangerai plus jamais de viande, pour ne pas faire tomber mon frère.

Il faut suivre la logique de saint Paul pour voir que toute son argumentation est d’ordre moral. L’unique mot qui peut résumer ce chapitre est la « responsabilité ». Une responsabilité vis-à-vis des faibles, au point où saint Paul finit son développement par une phrase en forme de conclusion à retenir : « Si une question d’aliments doit faire tomber mon frère, je ne mangerai plus jamais de viande, pour ne pas faire tomber mon frère ». On peut le voir aisément : manger un aliment particulier peut devenir un scandale si nous le consommons. Dans cette logique, si la conscience de mon frère ou de ma sœur n’est pas encore solide, si son niveau de foi reste encore infantile, pour ne pas semer le trouble en lui, il vaut s’abstenir de manger un repas qu’on pourrait manger en d’autres circonstances.

En prolongement de cette idée et pour m’en arrêter-là, il est aussi un péché d’inviter une personne à table et de lui proposer un repas auquel il est réfractaire soit physiologiquement soit spirituellement. Il faut respecter chacun dans ses principes alimentaires. La pratique courante consistant à se jouer des personnes, qui disent ne pas aimer un repas particulier, en leur préparant précisément ce repas sous des dehors trompeurs, est un péché contre la personne. En effet, nous ne respectons pas sa conscience et sa foi.

À ce propos justement, les circonstances nous interdisent certaines libertés qui nous sont accordées dans la foi. Le même saint Paul dit : « Tout m’est permis, mais tout ne m’est pas profitable » (1 Co 10, 23). Ce n’est pas parce que le chrétien peut se nourrir de tout aliment, qu’il lui est profitable de le faire partout. À ce niveau précisément, si le scandale consiste à faire tomber son frère dans le péché, manger un repas interdit par les membres d’une communauté dans laquelle on se trouve est un péché.

Un exemple fictif peut nous aider. Je suis dans un milieu culturel où on ne touche ni ne mange le rat. Il se fait que moi, particulièrement, j’en raffole. Si les rats pullulent dans ce milieu et que, pour manifester ma liberté, j’en touche et j’en mange, j’aurai commis un péché, car il s’agit d’un scandale. Le scandale réside dans la provocation des autres et donc dans la perturbation des règles de vivre-ensemble. Il se pourrait que les gens du milieu développent un comportement de haine et de violence envers ma personne. Je suis ainsi à la source de leur péché. Manger le rat dans ce milieu est proprement un péché contre l’art du savoir-vivre. Dieu nous invite même à nous soumettre aux dispositions des autorités du milieu où nous nous trouvons, sauf si celles-ci nous éloignent de l’amour que nous devons avoir pour Dieu et le prochain. Saint Paul, s’adressant aux Romains, dit :

Que chacun soit soumis aux autorités supérieures, […] C’est une nécessité d’être soumis, non seulement pour éviter la colère, mais encore pour obéir à la conscience. C’est pour cette raison aussi que vous payez des impôts : ceux qui les perçoivent sont des ministres de Dieu quand ils s’appliquent à cette tâche.

À ce bout de notre recherche, nous sommes toujours convaincus qu’aucun aliment n’est interdit pour le chrétien. Mais tout aliment devient un interdit à partir du moment où il devient occasion de péché envers soi-même et envers le prochain. Et alors, il faut s’abstenir de le consommer.

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Abbé Jean Oussou-Kicho

Je suis prêtre de l’archidiocèse de Cotonou (Bénin), ordonné en 2008, licencié en théologie morale. Directeur de complexe scolaire, je suis investi dans la pastorale des réseaux sociaux, devenus un nouveau terrain propice pour l’évangélisation et l’éducation des chrétiens

Cet article a 12 commentaires

  1. Constant

    Merci beaucoup les Padres que Dieu vous fortifie dans son amour afin que nous soyons toujours édifié

  2. Higor GUIDI

    C’est très intéressant.
    Merci beaucoup pour la lumière
    Du courage à vous

    1. Brigitte BONOU

      Merci beaucoup mon père pour l’orientation. Que le Seigneur vous fortifie

  3. DANTONGNON Éric

    Merci mon père, bien édifié maintenant, Que l’esprit de Dieu nous guide davantage

  4. Honorat

    Merci beaucoup pour cet article qui éclaire vraiment.

    1. Tchoumba

      Merci padré de cette leçon que vous nous donnez.

      1. Kuassi Sévérin HOUNGBO

        C’est super édifiant. J’ai eu un des plus.

  5. Claude MIDINGOYI

    Merci beaucoup père pour le message
    Que Dieu nous aide à mettre en application toutes ses paroles

  6. DEGUENON Gauthier

    Très claire. Merci beaucoup. Ça nous aide à grandir dans la foi.

  7. Brice GOHOUNGBE

    Bonjour mon Père. On n’arrive plus à copier les textes de vos réponses aux questions pour pouvoir les partager sur d’autres plateformes. Je ne sais si cela peut être revu. Merci beaucoup pour les efforts que vous consentez pour nous éclairer.

  8. Ebonosse Julie Pierrette

    Merci beaucoup padre que Dieu vous inspire d’avantage .j’ai beaucoup appris vraiment intéressant .je confirme que le peuple péris faute de connaissances . Mon garde moi près de ta parole

  9. OGUI Bienvenu

    Merci cher père

Les commentaires sont fermés.