La prière : pourquoi ? comment ?

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Nous voyons souvent la prière comme un acte qui consiste à demander à Dieu des dons ou des grâces appropriés. Mais la prière, dans un sens plus général, est une attention de l’âme aux choses de Dieu pour mieux le connaître et mieux être uni à lui.

La prière peut revêtir de nombreuses formes : louange, action de grâce, méditation de la Parole de Dieu, adoration silencieuse… mais souvent, il faut bien le reconnaître, c’est la demande qui est l’acte principal de la prière. Certains verbes employés par l’Écriture pour décrire la prière en témoignent : invoquer, intercéder, méditer, implorer et même, très souvent, crier !

Notons tout de suite que les demandes formulées dans la prière ne sont pas destinées à instruire Dieu ni à forcer son action, mais plutôt à faire appel à sa bonté pour ce dont nous avons besoin au quotidien dans nos vies. Notre prière de demande est donc nécessaire, non pas parce que Dieu ignore nos besoins, mais plutôt pour exprimer nos désirs après les avoir purifiés, pour concentrer notre attention sur ce que nous avons à demander à Dieu et surtout pour nous aider à renforcer notre relation personnelle avec lui.

Par la prière, nous reconnaissons donc la souveraineté, la puissance et la bonté de Dieu ; nous lui confions notre propre besoin et notre dépendance. La prière implique une immense confiance en Dieu ; elle nous habitue à nous tourner vers lui pour toute chose parce que nous désirons recevoir tout bienfait comme étant un don de sa propre main.

La prière suppose donc d’une part la foi en Dieu et d’autre part l’espérance en sa bonté. Pour cela, l’expression de cette prière n’a pas besoin d’être externe ou vocale ; elle peut simplement être interne ou mentale.

Pour quoi devons-nous prier ?

La grâce est requise d’une part pour nous disposer à prier et d’autre part pour nous aider à déterminer pour quoi prier.

Cette grâce, c’est « l’Esprit Saint [qui] vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut. L’Esprit lui-même intercède pour nous par des gémissements inexprimables. » (Rm 8, 26).

Cela étant dit, il y a des choses pour lesquelles nous sommes toujours sûrs de devoir sans cesse prier : notre salut et les moyens d’y parvenir, la résistance à la tentation, la pratique de la vertu, la persévérance finale… Nous avons constamment besoin de la lumière de l’Esprit pour connaître les moyens qui nous y aiderons le plus.

Pour que nous ne nous trompions pas, le Christ nous a enseigné ce que nous devons demander dans la prière et dans quel ordre nous devons le demander. En effet, en réponse à la demande de ses disciples de leur apprendre à prier, Jésus leur a enseigné la prière du « Notre Père ». Jésus nous dit donc que nous devons avant tout prier pour que Dieu soit glorifié, pour que son royaume vienne et pour que nous vivions conformément à sa volonté. Il ne faut en effet rien demander dans notre prière qui ne soit en conformité avec la volonté de Dieu à notre égard. Voilà pour les objets spirituels de notre prière.

Mais Jésus nous apprend aussi que nous devons demander des choses temporelles : notre pain quotidien – qu’on peut parfaitement comprendre au sens large : la santé, la force, d’autres biens matériels mais aussi intellectuels, moraux et, plus généralement, tout ce qui peut servir Dieu et nos semblables –.

Enfin, nous devons prier pour échapper à la punition de nos péchés, aux dangers de la tentation et à toutes sortes d’afflictions physiques ou spirituelles dans la mesure où elles pourraient nous empêcher de servir Dieu.

Qui prions-nous ?

Bien que Dieu le Père soit mentionné dans cette prière comme étant celui que nous devons prier, il nous est tout à fait possible d’adresser nos prières aux deux autres personnes divines : le Seigneur Jésus et l’Esprit saint.

En effet, faire appel à une des trois personnes de la Trinité n’exclut nullement les autres.

La prière peut en effet être adressée au Christ parce qu’il est une personne divine ; notre prière doit toujours être adressée à une personne ; en revanche, la prière ne peut jamais invoquer quelque chose d’impersonnel ou d’abstrait. Par exemple, une prière au cœur du Christ, à ses plaies, à sa croix… doit être prise au sens figuré comme étant une prière en fait adressée au Christ lui-même.

Qui peut prier ?

Le Seigneur Jésus a promis d’intercéder pour nous (Jn 14, 16) et il le fait (Rm 8, 34 ; He 7, 25), nous devons évidemment demander son intercession ; il est en effet le seul médiateur (1 Tim 2, 5).

Le Christ prie son Père en vertu de sa nature et de ses propres mérites ; les saints intercèdent pour nous également en vertu des mérites du Christ (et non des leurs propres). Par conséquent, lorsque nous prions un saint – ou, plus exactement, lorsque nous prions Dieu par l’intermédiaire d’un saint –, c’est pour demander leur intercession en notre faveur et non pas pour attendre qu’ils puissent nous accorder des dons de leur propre puissance ou les obtenir en vertu de leur propre mérite. Ceci est très important à retenir car il y a souvent des confusions sur ce point.

Même les âmes du purgatoire prient : elles prient Dieu d’inciter les fidèles à offrir pour elles des prières, des sacrifices et des œuvres expiatoires. Elles prient aussi pour elles-mêmes et pour les âmes encore sur terre. Comme les événements futurs peuvent être influencés par leurs prières, elles font par leur prière tout ce qui est en leur pouvoir pour réaliser ce qui est le mieux.

Les justes peuvent prier… et les pécheurs peuvent aussi prier. Bien qu’il n’y ait aucun mérite surnaturel dans la prière du pécheur endurci, sa prière peut toutefois être entendue par Dieu ; le pécheur prie donc comme s’il n’avait pas péché. Peu importe à quel point il a pu s’endurcir dans le péché, il doit prier pour être délivré de ses fautes et des tentations qui l’assaillent ; de cette prière peut s’ouvrir un chemin de conversion. On pourrait croire que la prière d’un pécheur endurci pourrait offenser Dieu ; ce serait le cas s’il était hypocrite ou présomptueux comme s’il demandait à Dieu de le laisser continuer dans sa mauvaise voie. Souvenons-nous de la pauvre prière du publicain qui se tenait à distance et n’osait pas lever les yeux vers le Ciel (Lc 18, 13).

En revanche, en enfer, la prière est impossible : ni les démons ni les âmes perdues ne peuvent prier ou être l’objet de prières.

Pour qui pouvons-nous prier ?

En priant les uns pour les autres, nous sommes certains que Dieu accorde ses faveurs. En vertu de la communion des saints au sein de l’Église, en tant que membres du Corps mystique du Christ, chacun peut bénéficier des prières des autres comme si elles étaient siennes. C’est le fondement du désir de saint Paul qui « encourage, avant tout, à faire des demandes, des prières, des intercessions et des actions de grâce pour tous les hommes » (1 Tim 2, 1), pour tous, sans exception, pour les grands et les humbles, pour les justes, pour les pécheurs, pour les infidèles, pour les morts comme pour les vivants, pour les ennemis comme pour les amis.

Les effets de la prière

En entendant notre prière, Dieu ne change pas forcément sa volonté ou son action à notre égard, mais il met simplement en œuvre ce qu’il avait éternellement décrété dans l’attente et l’espoir de notre prière.

Il peut le faire directement en nous accordant un don surnaturel – comme une grâce –.

Il peut le faire indirectement en nous accordant un don ou un bienfait naturel. Dans ce dernier cas, sa providence concourt à l’effet désiré.

Enfin, par une intervention miraculeuse, Dieu a aussi la possibilité de produire l’effet demandé.

L’usage ou l’habitude de la prière nous est bénéfique à bien des égards. En plus d’obtenir les dons et les grâces dont nous avons besoin, la prière élève également notre esprit et notre cœur à la connaissance et à l’amour des choses divines ainsi qu’à une plus grande confiance en Dieu. Même lorsque notre prière semble ne pas être exaucée, nous retirons quelque chose de notre prière. Mais très souvent, les bénéfices de la prière sont bien plus avantageux que ce que nous demandons. Rien de ce que nous pourrions obtenir en réponse à notre prière ne saurait dépasser en valeur cette conversation familière avec Dieu qui, justement, est la prière.

En outre, par notre prière, nous pouvons obtenir le pardon de nos péchés véniels, la grâce de ne plus chuter, l’accroissement de la grâce sanctifiante et la satisfaction pour la peine temporelle due au péché.

Mais ces bénéfices ne sont que des accessoires à la prière dont la raison centrale est basée sur la promesse infaillible de Dieu : « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. » (Mt 7, 7) ; « Amen, je vous le dis : quiconque dira à cette montagne : “Enlève-toi de là, et va te jeter dans la mer”, s’il ne doute pas dans son cœur, mais s’il croit que ce qu’il dit arrivera, cela lui sera accordé ! » (Mc 11, 24 – voir aussi Lc 11, 11 ; Jn 16, 24…).

Les conditions de la prière

Les promesses du Christ concernant la prière n’excluent toutefois pas certaines conditions dont dépend l’efficacité de celle-ci.

En premier lieu, l’objet de la prière doit être digne de Dieu et bon pour celui qui prie. Cette condition est toujours implicite dans la prière de celui qui veut faire la volonté de Dieu, qui est prêt à accepter toute faveur spirituelle que Dieu lui accordera et qui est désireux des biens matériels seulement dans la mesure où ils peuvent l’aider à mieux servir Dieu.

Ensuite, la foi est nécessaire ; pas seulement la croyance vague que Dieu est capable de répondre à nos prières ou encore que la prière constitue un moyen puissant d’obtenir la faveur de Dieu mais plutôt la confiance inébranlable dans la fidélité de Dieu à sa promesse d’écouter chacune de nos prières. Cette confiance implique un acte spécial de foi et d’espérance : si notre demande est formulée réellement pour notre bien, nous sommes certains dans la foi que Dieu nous l’accordera, ou qu’il nous donnera quelque chose d’équivalent ou de meilleur encore, selon ce qu’il jugera dans sa sagesse.

Pour être efficace, la prière doit aussi être humble. Si nous demandons à Dieu quelque chose comme si on avait un droit sur sa bonté ou encore comme si nous possédions un titre pour obtenir une faveur de sa part, alors nous ne lui adresserions pas une prière… mais formulerions une exigence ! Ce n’est pas de la même nature !

La parabole du pharisien et du publicain illustre cela très clairement, et il existe d’innombrables témoignages dans l’Écriture sur la puissance de l’humilité dans la prière. « Tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé » (Ps. 50, 19). « La prière de celui qui s’humilie percera les nuées » (Si 35, 21). Nous devons donc nous assurer que notre conscience est bonne et qu’il n’y a aucun défaut dans notre demande qui soit incompatible avec la prière.

La sincérité est une autre qualité nécessaire de la prière. Il serait en effet vain et hypocrite de demander une faveur sans faire tout ce qui est en notre pouvoir pour l’obtenir par nos propres moyens ; il ne faut pas mendier sans vraiment s’en donner les moyens.

Le sérieux est une autre de ces qualités : il exclut toutes les demandes tièdes ou sans conviction. Se résigner à la volonté de Dieu dans la prière n’implique pas qu’on doive être indifférent au fait d’être entendu ou non, de recevoir ou de ne pas recevoir. Au contraire, être résigné à la volonté de Dieu n’est possible qu’après avoir exprimé sincèrement notre désir dans la prière. Ce sérieux est l’élément qui rend la prière persévérante ; ce sérieux dans l’insistance a été si bien décrit dans des paraboles telles que l’ami à minuit (Lc 11, 5-8) ou elle de la veuve et du juge inique (Lc 18, 2-5) ; ils obtiennent finalement le don précieux de la persévérance dans la grâce.

L’attention dans la prière

Enfin, l’attention est de l’essence même de la prière.

La prière nécessite en effet l’attention de nos facultés intellectuelles. Dès que notre attention cesse, que notre esprit est détourné vers une autre pensée, notre prière cesse. Celle-ci ne reprend que lorsque l’esprit se retire de l’objet de la distraction pour revenir à celui de la prière. Il ne faut donc pas accepter la distraction quand on veut prier ; lorsque nous nous rendons compte que nos distractions nous ont entraîné loin de la prière, il faut donc revenir sans tarder à celle-ci.

La nécessité de la prière

La prière est nécessaire au salut.

C’est un précepte du Christ dans les évangiles (Mt 6, 9 ; 7, 7 ; Lc 11, 9 ; Jn 16, 26 ; Col 4, 2 ; Rm 12, 12 ; 1 P 4, 7). Ce précepte ne nous impose que ce qui est vraiment nécessaire comme moyen de salut. En effet, sans prière, nous ne pouvons pas résister à la tentation, ni obtenir Dieu la grâce, ni grandir et persévérer en elle. Cette nécessité s’impose à tous selon nos différents états de vie. L’obligation de prier nous incombe en tout temps : « Jésus disait à ses disciples une parabole sur la nécessité pour eux de toujours prier sans se décourager » (Lc 18, 1). Mais, l’obligation de prier est plus forte encore quand nous avons particulièrement besoin de celle-ci : pour surmonter un obstacle ou remplir une obligation, pour exercer la charité autour de nous, pour satisfaire aux obligations de l’Église comme l’assistance à la messe et l’observance des dimanches et jours de fête.

L’obligation de prier nous incombe à tout moment, non pas que la prière soit notre seule occupation. Les textes de l’Écriture nous enjoignant de prier sans cesse signifient que nous devons prier chaque fois que cela est nécessaire, comme cela est si souvent nécessaire ; que nous devons continuer à prier jusqu’à ce que nous ayons obtenu ce dont nous avons besoin. Certains auteurs parlent d’une vie vertueuse comme d’une prière ininterrompue, et font appel à l’adage « travailler, c’est prier ». Cela ne veut pas dire que la vertu ou le travail remplacent le devoir de prière, puisqu’il n’est possible ni de pratiquer la vertu ni de travailler correctement sans l’usage fréquent de la prière. La pratique de l’Église, suivie avec dévotion par les fidèles, est de commencer et de terminer la journée par la prière ; et bien que la prière du matin et du soir ne soit pas une obligation stricte, la pratique de celle-ci satisfait si bien notre sens du besoin de la prière que la négligence de celle-ci, surtout pendant une longue période, est considérée comme plus ou moins pécheresse, selon la cause de la prière. La négligence dans la prière du matin et du soir est généralement une forme de paresse.

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Frère Hervé

Je suis un religieux ermite, consacré dans cette forme de vie par mon évêque. Je réside en France et suis passionné par la recherche de la Vérité dans l’Écriture sainte, dans la philosophie et la théologie.

Cet article a 14 commentaires

  1. Sage mayuba

    Merci beaucoup mon père pour l’article que le seigneur vous bénisse et vous donne encore plus de sagesse. ❤

  2. Eudoxie

    Merci pour mon père pour l’article. Mais comment faire pour être à 100% concentré quand on prie.?

    1. Frère Hervé

      C’est souvent un long apprentissage :

      • au début de la prière, demander la grâce d’une bonne concentration et offiri d’avance ses distractions
      • revenir à la prière dès qu’on s’aperçoit que l’esprit est parti ailleurs
      • ne pas se décourager : les distractions viennent aussi de notre psychologie : certains sont mieux armés, d’autres plus faibles
      • ne jamais juger de la qualité de sa propre prière

      Plus on prie, et plus l’attention au Seigneur se développe et moins les distractions sont nombreuses.

  3. TODEGO Hervé

    Très ravie par votre exposé sur la prière..

    Prions
    Prions
    Prions sans cesse

    Que Dieu vous comble

    1. Bruno Sawadogo

      Merci frère Hervé que Dieu vous bénisse d’avantage et achève ce qu’Il a commencé pour vous. Vous faites beaucoup pour nous. Union de prière

  4. BOGNON Théophile

    Merci chèr père. Une petite question est ce les morts en général qui ne peuvent plus prier pour eux-même ou les âmes qui sont en enfer?

    1. Frère Hervé

      Les âmes qui sont au ciel et au purgatoire continuent de prier.
      Les âmes qui sont au purgatoire peuvent bénéficier de nos prières.
      Celles qui sont en enfer ne peuvent ni prier ni bénéficier de nos prières.

  5. GANKPON Raphaël

    Vraiment instructif. Merci cher père.

    Soyez davantage béni et comblé des dons de l’Esprit Saint, qui feront encore plus de vous, instrument au service de Dieu et des autres.

  6. SAWADOGO Justin

    Les mots me manque pour apprécier à sa juste valeur. merci, L’Esprit Saint vous comble davantage.

  7. Vignault Odile

    Merci Frère Hervé pour cette réflexion approfondie sur le pourquoi, le pour quoi et le comment prier.
    Une question: dans Mat 18,20, Jésus dit: quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d eux”. Alors quand je prie seule et que j invoque son nom très saint, il est où Jésus? pas là avec moi comme avec les deux ou trois?
    Merci frère Hervé, pour votre réponse!
    Bien fraternellement

  8. Houndakon Alice

    Merci mon père pour le travail abattu que l’esprit Saint vous comble de ces grâces amen.

  9. Etienne Cibangu

    Merci mon Père.
    Svp Padre, veuillez m’expliquer pourquoi les âmes qui sont en enfer ne peuvent plus prier et pourquoi elles ne peuvent pas bénéficier de nos prières. La Miséricorde divine a-t-elle des limites?
    Ensuite, une âme peut quitter le purgatoire vers l’enfer? Pourquoi ?
    Enfin, la prière peut changer le dessein de Dieu sur soi (transformer sa destinée)?
    En entente de vos réponses pouvant faire recours aux textes bibliques, je vous remercie.

  10. Charles TCHIKITI

    Merci beaucoup Père

  11. El pelegrino

    Prier pour “échapper à la punition de nos péchés”…!!?

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