Le chrétien peut-il manger la viande sacrifiée aux idoles ?

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Viande cher le boucher

Beaucoup de personnes se demandent le comportement à tenir par rapport aux viandes que les autres groupes religieux sacrifient à leurs divinités et qu’ils partagent aux voisins et connaissances ? Le chrétien doit-il les consommer ou s’en abstenir ? Telle est la question à laquelle nous tenterons de répondre.

Une question biblique

Les prescriptions liées au repas foisonnent dans la Bible. Il nous suffit de signaler la longue liste des aliments purs et impurs dans l’Ancien Testament (cf. Lv 11, 1-47) et le respect scrupuleux de ces dispositions par le peuple de la première alliance. Nous signalons, pour exemple, la tragique histoire de Eléazar qui a préféré mourir que de simuler avoir mangé la viande de porc frappée d’interdiction dans l’alimentation des Juifs (cf. 2Mac 6, 13-31). Nous nous rappelons certainement saint Pierre qui a opposé un refus total à la consommation des animaux impurs qui se présentaient à lui dans une vision (cf. Ac 10, 9-23).

C’est dire que la question des habitudes alimentaires n’est pas seulement de l’ordre du social. Elle a une connotation religieuse. Si les chrétiens n’ont pas d’interdits alimentaires, parce que le Christ a déclaré que tous les aliments étaient purs (cf. Mc 7, 19), les autres confessions religieuses, pour la majorité, possèdent des restrictions alimentaires, au point où, enfreindre l’une d’elles, peut être cause d’éprouvantes conséquences pour le contrevenant.

Pour le chrétien, à la différence des Juifs et des fidèles des autres religions, l’interdiction de manger les aliments ne se situe pas au niveau de l’animal dans sa simple expression, mais du symbole dont il est porteur. Ainsi, un bœuf, parfaitement comestible pour un chrétien, peut ne plus l’être si nous passons du cadre naturel au cadre religieux. L’identité du bœuf change, selon qu’il se trouve dans son milieu naturel ou qu’il est à usage religieux. C’est justement à ce niveau que se pose le problème. Qu’enseigne la Parole de Dieu aux chrétiens ?

S’abstenir des viandes offertes aux idoles

À la suite d’une violente discussion dans l’Église d’Antioche sur la nécessité ou non de la tradition mosaïque pour le salut des chrétiens (cf. Ac 15, 1-2), les apôtres et le conseil réuni autour d’eux prennent une décision dont une partie des conclusions est en lien direct avec notre sujet. Le cœur du message qu’ils envoient aux églises est clair  :

« L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations que celles-ci qui s’imposent : vous abstenir des viandes offertes en sacrifices aux idoles, du sang, des viandes non saignées et des unions illégitimes »

La recommandation est donc sans équivoque : le chrétien doit s’abstenir de consommer les viandes offertes aux idoles.

Reste entière la question de la définition religieuse de l’idole. Elle est plus qu’essentiel pour opérer le discernement sur les viandes offertes aux idoles. Pour le chrétien, qu’est-ce qu’une idole ? L’idole est toute réalité, vraie ou imaginaire, matérielle ou spirituelles, à laquelle l’homme attribue la nature divine. C’est ce que, dans la Bible, on désigne par l’expression générique de « faux dieux » ou d’  « autres dieux ». Voici les premiers mots des dix commandements dans le livre de l’Exode : « C’est moi le Seigneur ton Dieu qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude : tu n’auras pas d’autres dieux face à moi » (Ex 20,  2). Bien qu’il ne soit pas superflu de parcourir les autres textes, on peut se limiter à ce verset pour définir l’idole. Dieu se définit comme le Dieu d’Israël, par opposition aux « autres dieux  ». Il s’affirme comme l’unique Dieu qui sauve les fils d’Israël. Tous les autres dieux sont donc disqualifiés.

C’est tant et si bien vrai que dans le livre d’Isaïe, Dieu affirme : « Je suis le Seigneur, il n’en est pas d’autre : hors moi, pas de Dieu » (Is 45, 5). On peut multiplier les exemples à souhait dans Bible. La foi des chrétiens est basée sur l’unicité de ce Dieu, que le Fils nous révèle, lui qui, par son sacrifice, a rendu caduques tous les sacrifices de l’ancienne Alliance : « Écoute, Israël, le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur » (Dt 6, 4, Mc 12, 29). Hormis donc le Dieu unique, celui des chrétiens, Un unique Dieu en trois personnes, tous les autres sont des faux dieux et, conséquemment, en leur offrant des sacrifices, on les offre logiquement aux idoles.

Une fois le contour du mot « idole » cerné, il faut comprendre la pensée des apôtres qui demandent de s’abstenir totalement des viandes offertes aux idoles (idolothytes) et du cas de conscience dont parle Saint Paul dans 1Co 8, 1-13. Saint Paul ne contredit pas la décision du collège des apôtres, d’autant qu’il a participé lui-même à cette prise de décision.

Alors que le collège des apôtres est formel sur la question, interdisant la consommation des viandes offertes aux idoles, saint Paul va expliquer l’intention des apôtres aux Corinthiens, en focalisant sa pensée sur la nécessité de la responsabilité des plus forts dans la foi des plus faibles. Pour lui, la certitude des chrétiens de la non existence des idoles et leur liberté doivent s’acquitter de tout compromis et de toute compromission quant à la consommation des viandes sacrifiées aux idoles à cause de la chute possible que cette consommation peut provoquer chez les nouveaux chrétiens.

D’ailleurs, deux chapitres plus tard, dans la même lettre, saint Paul dit :

« Tout ce qui se vend au marché, mangez-en sans poser de questions par motif de conscience. Car il est écrit : Au Seigneur, la terre et ce qui la remplit. Si vous êtes invités par quelqu’un qui n’est pas croyant, et que vous vouliez vous rendre chez lui, mangez tout ce qu’on vous sert sans poser de questions, par motif de conscience. Mais si quelqu’un vous dit : Cela, c’est de la viande offerte en sacrifice, n’en mangez pas, à cause de celui qui vous a prévenus et par motif de conscience. Je ne parle pas de votre conscience à vous, mais de celle d’autrui ».

Il est donc en parfaite logique avec la décision des apôtres quand il dit : « Si une question d’aliments doit faire tomber mon frère, je ne mangerai plus jamais de viande, pour ne pas faire tomber mon frère » (1Co 8, 13). La dernière phrase de ce chapitre pousse à l’extrême la décision de saint Paul : ne même plus jamais manger de viande, par souci du frère.

Foi et fraternité.

Avant de clore cet article, il me faut lever une méprise. La prise de position de saint Paul nous permet de revenir sur une implication que ne viserait pas cet article : éviter systématiquement de manger chez nos frères des autres confessions religieuses. Notre propos est à situer au niveau strictement religieux et non social. Les viandes offertes aux idoles nous plongent d’emblée dans la sphère des croyances.

Sous ce rapport précis, les communautés de foi sont différentes les unes des autres et, dans le domaine de la foi, les signes (signifiants et signifiés) ont des sens différents. S’il est vrai qu’interdiction est faite aux chrétiens de manger la viande offerte aux idoles, il convient de rappeler qu’au nom de la fraternité humaine, nous pouvons manger, hors du cadre religieux, chez nos frères et sœurs des autres traditions religieuses.

Ainsi, si je vais chez un parent ou une connaissance et qu’il m’offre du repas, je ne vais pas lui opposer mon appartenance religieuse pour ne pas manger chez lui. Nous sommes tous des hommes, des créatures humaines, appelées à vivre ensemble. S’il est bon partager ensemble, dans un contexte dépourvu de symbolisme religieux, le repas chez tout homme, il est à éviter à tout prix, de prendre le même repas au motif d’un repas sacré. La sacralité ou non du repas est le point nodal de notre prise de décision de manger ou non. Il ne s’agit donc pas d’une attitude de personne à personne, mais d’un principe lié à la foi.

Nous ferons dans un autre article, une étude de cas à travers cette question : le chrétien peut-il consommer la viande du mouton partagée à la Tabaski ?

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Abbé Jean Oussou-Kicho

Je suis prêtre de l’archidiocèse de Cotonou (Bénin), ordonné en 2008, licencié en théologie morale. Directeur de complexe scolaire, je suis investi dans la pastorale des réseaux sociaux, devenus un nouveau terrain propice pour l’évangélisation et l’éducation des chrétiens

Cet article a 9 commentaires

  1. Justin SAWADOGO

    Merci bien Padre. DIEU vous la force de faire l’article sur la question que vous avez posé en dernière position dans un bref délai. Merci et soyez béni

  2. GANDONOU Agounmalo Inoussa

    Bonjour mon père merci pour ce article. Le Seigneur m’a dit intérieurement de ne plus en manger. Depuis un certain temps je n’en prends plus mais les gens me considèrent d’égoïste et je leur réponds que c’est ma foi qui ne me le permet plus

  3. Sem

    Quand, j’ai commencé ma seconde conversion, j’ai arrêté de manger la viande de porc et la viande au idole . J’ai aussi arrêté la boisson alcoolisée. Tel changement a bouleversé mon entourage au point où il se demandait si ma nouvelle vie était normale!
    Dieu transforme véritablement.

  4. SANOU AMBROISE

    Bonjour a vous. Merci pour le partage.
    Il t’a beaucoup de chose que je ne comprend pas.
    Le terme sacrifice. Je pense que il a d’autres dimensions contraire a votre développement.
    Le Dieu des musulmans. En comment vous l’avez rendu idole du moment que cette religion crois et reconnaît tous les prophètes auxquels nous croyons.
    Si possible, soyez précis sur ses partie.

  5. Emmanuel Atiko

    Merci mon Père pour le partage.
    Je résume ma compréhension en une phrase :si j’ai un ami ou voisin musulman par exemple,je peux partager avec lui des repas ordinaires de tous les jours. Mais lorsqu’il s’agira d’une occasion spéciale (ramadan ou Tabaski par exemple), je m’abstiens de consommer ou accepter la viande offerte…

    1. Abbé Jean Oussou-Kicho

      C’est exactement ce que veut faire comprendre l’article. Merci Emmanuel d’en avoir fait la synthèse.

      1. Emmanuel Atiko

        Merci beaucoup mon Père !

  6. Paneto

    Très grand merci au Père pour toutes ces explications qui nous édifient dans le cheminement de notre foi.

  7. Alicia

    Bonjour,
    Si je mange de la viande sacrifiée lors d’un repas religieux, parce que ça fait partie de la famille mais je n’adore que Dieu dans mon coeur. Est-ce mauvais?

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