Personne ne connaît le Fils sinon le Père

Bréviaire

Avant même de te former dans le sein de ta mère, je te connaissais. Voyons combien cette prophétie s’accorde, en un second sens, à la bonne nouvelle du Christ. Au commencement, ce qui est dit, c’est à propos d’un homme saint que cela est dit : Avant même de te former dans le sein de ta mère, je te connaissais ; avant que tu viennes au jour, je t’ai consacré ; je fais de toi un prophète pour les peuples. Il est manifeste que tout cela proclame et l’onction du Saint des saints, et son obéissance ainsi que sa glorification. Qui donc, en effet, en dehors de lui et autre que lui, avant même d’être formé dans le sein maternel aurait été connu du Père ? Qui d’autre, avant de venir au jour, aurait été consacré, aurait été fait un prophète pour les peuples ? Tous les fils d’Adam, assurément, et chacun d’entre eux, peuvent s’attribuer avec véracité la parole : Moi, je suis né dans la faute, j’étais pécheur dès le sein de ma mère.

Cependant, le terme même de « consacré » peut admettre plusieurs acceptions. Car c’est autrement, certes, que l’on nomme « consacré » ce qui n’accorde rien à la contagion du péché, consécration dont personne n’est gratifié, sinon par la grâce du Christ ; et autrement, que l’on nomme « consacré » ce qui est séparé du profane en vue d’usages ou pour un ministère sacrés. Cette acception du mot : « consacré » est si large que même le premier-né d’une bête de somme est dit « consacré » au Seigneur, en ce sens qu’il est légalement mis à part pour l’usage ou selon le droit des ministres consacrés de l’autel.

De même la connaissance dont parle ici Dieu : Avant même de te former dans le sein de ta mère, je t’ai connu ; cette « connaissance » n’admet pas moins diverses acceptions. Car c’est autrement, certes, qu’il connaît son Fils unique avant qu’il soit formé dans le sein de sa mère ; et autrement, qu’il connaît l’un quelconque de ses élus avant qu’il soit formé dans le sein de sa mère. Il connaît en effet son Fils unique à travers son essence coéternelle à lui-même, et il connaît l’un quelconque d’entre nous par sa prescience invariable et infaillible. Il a donc certes connu le prophète avant qu’il soit formé dans le sein de sa mère, et, avant qu’il ait vu le jour, il l’a consacré ; mais celui dont ce prophète est le type, le Prophète et le Seigneur des prophètes, son Fils unique, c’est lui seul qu’il a singulièrement connu, et qu’il a consacré, avant même qu’il soit formé dans le sein de sa mère, avant même que, fait homme, il ait vu le jour. Quant à cette connaissance dont le Père l’a connu, le Fils lui-même a dit : Personne ne connaît le Fils, sinon le Père. Ensuite, quant à la consécration que le Père lui a conférée avant même qu’il ait vu le jour, tous les hommes religieux, tous ceux qui ont une foi droite, professent unanimement avec certitude qu’il n’a pas été conçu par l’intervention d’un homme, mais du Saint-Esprit, et qu’il a été prophète pour les peuples, c’est-à-dire envoyé pour le salut non des seuls Juifs, mais aussi des nations.

Commentaire de Rupert de Deutz sur Jérémie
c. 4 : PL 167, 1367

Rupert de Deutz, né aux alentours de 1070 à Liège et mort le 4 mars 1129 à Deutz en Allemagne, est un théologien liégeois, entré dans son adolescence au monastère de Saint-Laurent où il reçut une formation littéraire.

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Frère Hervé

Je suis un religieux ermite, consacré dans cette forme de vie par mon évêque. Je réside en France et suis passionné par la recherche de la Vérité dans l’Écriture sainte, dans la philosophie et la théologie.

Cette publication a un commentaire

  1. Blandine

    Merci pour la nourriture spirituelle de chaque jour.

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