Pourquoi devons-nous aimer Dieu ?

Bréviaire

Quelle raison plus grande y a-t-il de la venue du Seigneur que la volonté qu’a eue Dieu de nous manifester son amour pour nous, en le parant des plus vives séductions  ? En effet, nous étions encore ses ennemis, quand le Christ est mort pour nous. Et voilà précisément pourquoi la fin du précepte et la plénitude de la loi, c’est la charité. Nous devons par suite, nous aussi, nous aimer les uns les autres. Et de même que le Christ a donné sa vie pour nous, de même nous devons, à notre tour, donner notre vie pour nos frères. Quant à Dieu lui-même, puisqu’il nous a aimés le premier et que, loin d’épargner son Fils unique, il l’a livré pour nous, nous devons, même s’il nous répugnait de l’aimer, n’avoir du moins maintenant aucune répugnance à lui rendre son amour.

Il n’y a pas, en effet, de plus grande invitation à l’amour que de faire, en aimant, les premières avances. Et trop dur est le cœur qui, se refusant à prendre l’initiative de l’amour, refuserait de répondre à l’amour dont il est l’objet. Nous le constatons bien dans les amours scandaleuses et dégradantes. Les amoureux qui veulent être aimés en retour ne font pas autre chose que déclarer et montrer, par toutes les preuves en leur pouvoir, combien ils aiment. Ils affectent de mettre en avant cette apparence de justice, au nom de laquelle ils réclament, en une certaine mesure, des cœurs qu’ils s’ingénient à séduire, de les payer de retour. Et eux-mêmes brûlent d’un feu plus ardent quand ils sentent que ces cœurs qu’ils convoitent sont mis en mouvement par le même feu. Si donc, d’une part, le cœur qui était engourdi, se réveille quand il se sent aimé  ; si, d’autre part, le cœur qui était déjà enflammé, s’enflamme davantage, quand il se sent aimé de retour, il est de toute évidence qu’il n’y a pas de plus grand moyen soit d’éveiller soit d’accroître l’amour, que de se savoir aimé quand on n’aime pas encore, ou d’être aimé à son tour quand on aime déjà, ou d’espérer l’être, ou de recevoir des preuves de cet amour.

Du moment que rien n’est plus opposé à la charité que l’envie, et que l’orgueil est le père de l’envie, le même Seigneur Jésus-Christ, Dieu et homme, est à la fois une preuve de l’amour divin à notre égard et un exemple, parmi nous, de l’humilité humaine. Il vise par là à guérir notre puissant orgueil par un antidote plus puissant encore. Grande misère, en effet, qu’un homme orgueilleux, mais plus grande miséricorde, un Dieu humble. Propose-toi donc cet amour, comme la fin où tu rapporteras toutes tes paroles; et tout ce que tu racontes, raconte-le de telle manière que ton auditeur croie en écoutant, espère en croyant, et aime en espérant.

Traité de saint Augustin sur la catéchèse
Lib. 1, 4: CCL 46, 126-127. 128-129

Saint Augustin, né le 13 novembre 354 à Thagaste (l’actuelle Souk Ahras, Algérie) et mort le 28 août 430 à Hippone (l’actuelle Annaba, Algérie), est un philosophe et théologien chrétien romain. Avec Ambroise de Milan, Jérôme de Stridon et Grégoire le Grand, il est l’un des quatre Pères de l’Église occidentale et l’un des trente-six docteurs de l’Église.

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Frère Hervé

Je suis un religieux ermite, consacré dans cette forme de vie par mon évêque. Je réside en France et suis passionné par la recherche de la Vérité dans l’Écriture sainte, dans la philosophie et la théologie.