Anéantissement divin et gratitude humaine

Bréviaire

Vous vous en souvenez, j’ai défini qu’il y a un anéantissement de Dieu  ; je vous invite également à porter votre attention sur trois points principaux. Cet anéantissement ne fut ni simple ni médiocre  : Dieu s’est anéanti lui-même jusqu’à la chair, à la mort et à la croix. On ne peut mesurer à sa valeur l’humilité, la bonté et la condescendance du Dieu de majesté qui accepta de revêtir notre chair, d’être mis à mort, et de subir l’infamie de la croix. Mais quelqu’un pourrait ici m’interrompre pour dire  : «  Le Dieu créateur ne pouvait-il donc réparer son œuvre sans subir cet abaissement  ?  » Certes il le pouvait, mais il préféra s’offrir à l’ignominie, afin d’ôter à l’homme l’occasion de commettre, outre ses autres péchés, le pire, le plus odieux de tous, c’est-à-dire l’ingratitude. Il a pris sur lui la plus lourde peine, afin que l’homme lui fût redevable du plus grand amour. La difficulté de la rédemption devait être un avertissement pour la créature que la facilité de sa condition première n’avait pas rendue assez reconnaissante.

Que disait, en effet, l’homme bénéficiaire de la création mais ingrat  ? Il disait  : «  J’ai été créé par pure grâce mais je n’ai coûté aucune peine à mon Créateur. Il a prononcé une simple parole, et j’ai été créé comme tous les êtres. Y a-t-il quelque chose de bien extraordinaire dans un don qui n’a coûté qu’un mot  ?  » Ainsi donc, rabaissant le bienfait de la création, l’impiété humaine trouvait un motif d’ingratitude là où il fallait reconnaître un motif d’amour  ; et l’homme agissait ainsi pour excuser ses fautes. Mais la bouche qui proférait l’injustice a été fermée. Il est manifeste que Dieu a payé pour l’homme un prix énorme  : maître, il s’est fait esclave; riche, il est devenu pauvre; Verbe, il s’est fait chair; et Fils de Dieu, il n’a pas dédaigné d’être le fils de l’homme.

Souvenez-vous que, si vous avez été faits de rien, vous n’avez pas été rachetés de rien. En six jours, Dieu a créé toutes choses, et l’homme parmi elles. Mais l’œuvre du salut a demandé trente années entières de terrestre labeur, enduré avec quelle patience  ! L’ignominie de la croix, l’horreur de la mort sont venues s’ajouter aux servitudes de la chair et aux tentations de l’ennemi  ! Il le fallait. C’est ainsi, Seigneur, que tu as sauvé les hommes et les bêtes, en multipliant ta propre miséricorde. Méditez bien cela, approfondissez ces pensées. Ranimez de ces parfums vos cœurs longtemps torturés par l’odeur importune de vos péchés, afin que vous deveniez riches également de ces onguents non moins doux que salutaires.

Sermon de saint Bernard sur le Cantique des cantiques
Sermo 11, 7-8: EC 1, 58-59
+ Oraison

Bernard de Fontaine, abbé de Clairvaux, né en 1090 à Fontaine-lès-Dijon et mort le 20 août 1153 à l’abbaye de Clairvaux, est un moine bourguignon, réformateur de la vie religieuse catholique.

Directeur de conscience et important promoteur de l’ordre cistercien, il recherche l’amour du Christ par la mortification la plus dure. Il fait preuve, toute sa vie, d’une activité inlassable pour instruire ses moines, pour émouvoir et entraîner les foules, pour allier son ordre avec la papauté et pour élaborer un dogme militant que son ordre et toute l’Église catholique mettront en œuvre. C’est aussi un conservateur, qui fustige les mutations de son époque, la « Renaissance du 12e siècle », marquée par une profonde transformation de l’économie, de la société et du pouvoir politique.

Mort en 1153, il est canonisé dès 1174 et devient ainsi saint Bernard de Clairvaux. Il est proclamé Docteur de l’Église catholique (Doctor mellifluus) en 1830 par le pape Pie VIII.

Oraison

Seigneur, tu as fait de saint Ambroise un docteur de la foi catholique et un courageux successeur des Apôtres ; suscite en ton Église des hommes selon ton cœur, capables de la gouverner avec force et sagesse.

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Frère Hervé

Je suis un religieux ermite, consacré dans cette forme de vie par mon évêque. Je réside en France et suis passionné par la recherche de la Vérité dans l’Écriture sainte, dans la philosophie et la théologie.