Mouvement entre l’action et la contemplation

Bréviaire

On mène la vie active avant d’en arriver à la vie contemplative. L’ordre normal est de tendre de la vie active à la contemplative, mais il faut savoir qu’il y a souvent grand profit à se reporter de la vie contemplative vers la vie active ; l’esprit rendu ardent par la contemplation, on vivra plus parfaitement la vie active. Celle-ci doit donc faire passer à la vie contemplative, mais la vie contemplative, elle, doit nous ramener parfois à une vie active que rendra meilleure ce que l’âme a saisi au-dedans.

La vie contemplative comporte une grande tension de l’âme, qui s’élève vers les réalités célestes, dirige sa puissance d’aimer vers les biens de l’esprit, s’efforce d’aller au-delà de ce que voient les yeux du corps, se contraint pour se dilater. Parfois elle triomphe et surmonte les résistances que lui opposent les ténèbres de sa cécité, jusqu’à atteindre à la dérobée quelque mince rayon de la lumière sans limites ; mais repoussée aussitôt elle revient sur elle-même ; elle s’en allait au-delà vers cette lumière en y aspirant, elle retourne en soupirant aux ténèbres de ses yeux impuissants.

L’histoire sacrée en propose un beau symbole, quand elle raconte la lutte du bienheureux Jacob avec l’ange. Tandis qu’il revenait chez ses parents, il rencontra sur sa route un ange avec lequel il eut à se mesurer dans une âpre lutte. Lorsqu’on se mesure avec quelqu’un dans une lutte, on le trouve tantôt supérieur à soi, tantôt inférieur. Comprenons que l’ange désigne Dieu et que Jacob luttant avec l’ange figure toute âme avancée et en état de contemplation. Quand cette âme s’applique à contempler Dieu, comme dans une épreuve de force, elle est tantôt près de l’emporter, car elle goûte, par l’intelligence, par le cœur, quelque chose de la lumière sans limites, et tantôt elle succombe, car, à l’instant même où elle goûte, la voici à nouveau défaillante. L’ange se laisse donc pour ainsi dire vaincre, quand Dieu se laisse saisir par l’esprit en son propre fond.

Lib. 2, hom. 2, 10-12: SC 360, 112-114

Grégoire le Grand, encore appelé Grégoire 1er, est un pape de l’Église catholique. Ses écrits ont marqué et continuent de marquer la vie de l’Église. Né vers 540, il meurt en 604.

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Frère Hervé

Je suis un religieux ermite, consacré dans cette forme de vie par mon évêque. Je réside en France et suis passionné par la recherche de la Vérité dans l’Écriture sainte, dans la philosophie et la théologie.